mardi 14 octobre 2008

Jour de souffrance

Après La vie sexuelle de Catherine M., Catherine Millet récidive avec un nouveau récit autobiographique, Jour de souffrance. Titre paradoxalement bien choisi pour le pauvre lecteur, étant donné que l’auteur se contente de l’ennuyer dans un long appel à la pitié et à la sympathie. Catherine Millet décrit comment, alors qu’elle découvre que son conjoint Jacques la trompe, elle cède à un élan masochiste et tente de découvrir tous les détails des aventures de Jacques, quitte à ruiner sa vie.

Le processus aurait pu être intéressant sans le profond pathétisme de la narratrice qui accuse hypocritement son amant de la tromper, même si elle ne voyait aucun problème à coucher avec nombre d’hommes jusqu’à ce que Jacques lui demande d’arrêter. S’ensuit une série d’épisodes de mensonges, d’espionnage, de récriminations et de crises d’apitoiement, sans oublier les scènes de coucheries et de masturbation que Catherine Millet semble prendre plaisir à exposer à un public qui ne veut rien en savoir.

Puisqu’il est question des incessantes références sexuelles, notons qu’elles sont écrites dans un style particulièrement navrant. Pas assez passionnées pour être romantiques, pas assez belles pour être érotiques, pas assez explicitement excitantes pour être pornographiques, pas assez choquantes et dérangeantes pour être obscènes, pas même assez froides pour être chirurgicales, elles sont d’un style que l’on pourrait à peine qualifier de discursif et laissent le lecteur avec l’impression de se retrouver face à une inconnue légèrement éméchée qui, ayant décidé de faire de lui son meilleur ami, décide de lui exposer en moult détails sa vie, alors que le pauvre ne demandait qu’à savourer un bon texte.

Jour de souffrance suscite un léger espoir au début du récit, alors que les réflexions se portent sur le monde imaginaire que les gens se construisent et qui finit par empiéter sur le réel. Le sujet aurait pu être intéressant s’il avait été poussé plus loin, mais le lecteur se rend vite compte que les délires de Millet ne sont qu’une excuse de plus pour décrire ses fantasmes masturbatoires, qui semblent de plus en plus n’avoir été placés là que pour faire vendre le livre à un public de mâles gavés à la testostérone qui seraient prêts à lire n’importe quoi pour peu qu’y figure le mot «fellation».

L’apothéose de la consternation se produit lorsque le lecteur se rend compte que la quasi-totalité du dernier chapitre semble avoir été greffée au livre, tant elle manque de lien avec le corps du récit. La seule utilité visible de ces pages superflues semble être de publiciser La vie sexuelle de Catherine M., qui est mentionnée beaucoup plus souvent qu’il n’est nécessaire.

Gregory Sternthal-Ouimet

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Gregory, j'adore ta critique. Tellement que je devais écrire une critique sur Jour de souffrance et j'ai décidé d'en faire une sur syngué sabour, à la place, parce que je ne voyais pas ce que je pouvais dire de plus. Bon travail !

Anonyme a dit…

Greg, tu as parfaitement raison sur toute la ligne. Tes tournures de phrases sont purement géniales! Bravo!

Anne-So